Du sous-texte à son aspect cinématographique, en passant par ses nombreuses références, Greta Gerwig revient avec nous sur son réjouissant "Barbie".
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Lady Bird. Les Filles du Docteur March. Et maintenant Barbie. Si l’idée de voir Greta Gerwig signer un film sur la célèbre poupée de Mattel pour le compte d’un gros studio (la Warner) en a surpris plus d’un, les premières images ont rassuré bon nombre de spectateurs.
Après avoir imposé son talent singulier d’actrice et scénariste, Greta Gerwig continue de faire de même en tant que réalisatrice. Et Barbie, qui rejoint ses films précédents avec son héroïne bien décidée à sortir de la boîte dans laquelle on veut, littéralement, la mettre, va même encore plus loin.
Barbie
Sortie :
19 juillet 2023
|
1h 55min
De
Greta Gerwig
Avec
Margot Robbie,
Ryan Gosling,
Ariana Greenblatt
Presse
2,0
Spectateurs
3,6
Séances (898)
De l’humour au décors colorés, en passant par les acteurs qui s’en donnent à cœur joie (Margot Robbie et un hilarant Ryan Gosling en tête), tout est au diapason dans ce récit fou, coloré et très cinématographique, sur lequel la cinéaste est revenue avec nous. Le temps d’un court entretien qu’elle aurait visiblement aimé prolonger, au vu de sa déception de voir notre créneau avec elle écoulé. Nous aussi, Greta.
AlloCiné : Devant le film, on a l’impression d’assister au dialogue deux versions de vous : l’enfant qui jouait avec des Barbie, et l’adulte d’aujourd’hui. Était-ce l’idée derrière ce projet, jeter un regard moderne et féministe sur votre enfance ?
Greta Gerwig : Tout à fait ! Le film a beaucoup consisté à établir un pont entre moi enfant et moi adulte. Noah Baumbach, avec qui je l’ai écrit, n’a pas beaucoup d’expérience avec les Barbie (rires) Mais il a puisé dans cette idée du jeu d’enfant, et ce résultat fou et anarchique, où tout peut arriver, vient en partie de là.
J’avais le sentiment que nous étions en train de jouer quand nous écrivions ensemble. Nous étions comme deux enfants en train de construire quelque chose de dingue, que nous laissions vivre sa propre vie. La mise en scène a ensuite eu pour but de faire en sorte que ces deux points de vues soient bien présents tout le temps.
La comédie prend ici des formes très différentes. Quelles ont été vos influences dans ce registre ?
Il y en a eu tellement… En ce qui concerne le look et l’ambiance de Barbie, j’ai beaucoup été influencée par les comédies musicales des années 40 et 50. Et comme Gene Kelly a toujours été mon choucou, il y a notamment eu Un Américain à Paris ou Chantons sous la pluie, qui ont été très formateurs pour moi.
Les comédies musicales de Vincente Minnelli aussi, avec ces couleurs et cette intériorité. Le Magicien d’Oz évidemment. Le ballet de rêve dans Oklahoma ! avec les chorégraphies d’Agnes de Mille, qui devient surréaliste mais qui ne vous perd pas. On n’a jamais l’impression que cela devient invraisemblable car on est dans la logique des comédies musicales et qu’on ne la remet pas en question.
En termes de rythme, de drôlerie et d’absurde, il y avait les comédies d’Howard Hawks et Preston Sturges. Ou le crescendo de L’Impossible Monsieur Bébé ou Madame et ses flirts : cette idée que le point de départ est simple, alors que cela devient de plus en plus fou et que le récit se construit de lui-même.
Pour ce qui est des trucages mécaniques et de tout ce qui est fait devant la caméra, les films de Michael Powell et Emeric Pressburger m’ont beaucoup influencée. Une question de vie ou de mort, Les Chaussons rouges. Ils sont très théatraux mais donnent l’impression d’avoir leur propre langage cinématographique.
Et ce sont des réalisateurs intelligents. On les voit et on comprend tout de suite ce qu’ils ont voulu faire. Il y a une scène de Une question de vie ou de mort où l’image s’arrête alors qu’ils jouent au ping pong : les balles sont attachées à des fils très fins et on voit que les acteurs ne bougent pas, mais c’est malin. C’est fait à la main et très satisfaisant. Là aussi, on revient à l’idée de voir des enfants jouer.
Est-ce qu’en plus d’être aussi cinématographique, “Barbie” ne serait pas un film sur le cinéma ? Avec Barbie Land qui serait ce que l’on voit à l’écran, et le vrai monde les coulisses, pas toujours reluisantes ?
Oui ! Oui ! J’ai toujours vu Barbie Land comme Cinema Land. C’était même plus explicite dans une version que nous n’avons pas tournée : quand le monde de Barbie est créé, il y avait des machinistes qui apportaient tout. Car je voulais que l’on voit les limites, montrer que c’était un décor de studio.
Mais j’ai pensé que nous allions peut-être un peu trop loin. Il fallait que l’on s’engage dans l’intériorité du décor, sans avoir le cadre dans le cadre dans le cadre. Mais c’est l’idée derrière ce monde.
Propos recueillis par Maximilien Pierrette à Londres le 12 juillet 2023